bribes de vie

J’ai enseigné le français pendant de nombreuses années dans différents collèges. Même si je pense avoir toujours rempli ma tâche avec une belle conscience professionnelle –les rapports d'inspection et les notations en attestent – j’ai toujours eu , comme la majorité des enseignants non pas la crainte mais le stress de l’inspection surprise ou annoncée à la dernière minute.

Pour ne pas être pris au dépourvu et devoir faire un cours où je ne me serais pas senti à l’aise, j’avais toujours dans ma serviette deux textes en une trentaine d’exemplaires , prêts à être distribués aux élèves . L’explication de textes était en effet un bon moyen d’avoir une classe vivante et de m’assurer de la participation des élèves.

J’étais donc prêt en toutes circonstances à lancer l’explication de la fable le loup et le chien de La Fontaine pour les élèves de 6e ou 5^e et du poème de Baudelaire L’homme et la mer pour les élèves de 4^e ou 3e

Confiance absolue , succès assuré !

LES ORAUX

On se souvient toujours, parce qu’on les a enregistrées visuellement, des épreuves orales de certains examens ou concours que l’on a passés. Mon baccalauréat ,dans ce lycée aux salles aussi grandes et tristes qu’étaient hauts les plafonds. Dans chaque coin un examinateur, homme ou femme, qui parlait à voix basse. L’examinateur de mathématiques bénéficiait de l’usage du tableau noir pour ses équations d’algèbre ou ses figures de géométrie.

Mon entretien de sélection au rectorat pour le concours d’inspecteur. Questions sur le déroulement de ma vie professionnelle bien sûr, sondage pour évaluer mon degré de motivation et une question de culture générale : Que pensez- vous des théories de l’inné et de l’acquis ?

Et puis cette autre épreuve orale pour le même concours , au Ministère de l’Education Nationale, devant un parterre de sept personnes qui me « cuisinent » là encore sur les problèmes de pédagogie et cette avant dernière question : « L’art peut il (ou doit-il) s’intéresser au laid ?. La dernière question étant : si votre candidature est retenue, monsieur, acceptez –vous d’être nommé sur tout poste vacant en France ? La question piège…

   Il est bon d'avoir comme ami un collégien dont le père est prof et enseigne dans notre classe. Ce fut mon cas. Le beau 17 en Histoire que j'ai obtenu un jour au  cours d'un contrôle trimestriel n'était pas le résultat mérité d'un travail fourni. Le papa de mon copain Jacques C. ne s'est jamais rendu compte que les notes mirobolantes de certains de ses élèves étaient dues à  "une fuite". Son sale gamin était allé fouiller là où il fallait et en avait sorti le précieux sujet qui fut partagé par quelques privilégiés.. Le délit d'initiés n'est pas d'aujourd'hui  !